Parc immobilier de l’Etat : Alain Resplandy-Bernard, son directeur, fait le point
Coïncidence de calendrier. Alain Resplandy-Bernard, Directeur de l’Immobilier de l’Etat, est venu faire le point sur l’état du parc immobilier de l’Etat et ses enjeux pour les années à venir, à l’invitation du club des PPP, mercredi 8 octobre, tandis qu’on apprenait au même moment que la gendarmerie ne payait plus ses loyers faute d’argent. Gigantesque, épars, hétérogène, l’entretien et la rénovation du parc immobilier de l’Etat sont une gageure. Avec 95,9 millions de m2 de surface brute utile et près de 200 000 bâtiments, ce parc nécessite pour être rénové (et notamment remplir les objectifs bas carbone du pays) d’investir 142 milliards d’euros d’ici 2050. C’est-à-dire un chiffre supérieur à la réelle capacité financière de la DIE pour y parvenir actuellement.
Vers la création d’une foncière d’Etat
Comment faire ? Alain Resplandy-Bernard a évoqué plusieurs leviers d’action. Le premier concerne la création d’une société foncière, déjà annoncée par l’ancien ministre Thomas Cazenave, d’ici le 1er janvier 2025, pour optimiser la gestion de ce patrimoine, sanctuariser les crédits et garantir la pertinence des investissements. Déjà opérationnel dans de nombreux pays européens, ce modèle a fait ses preuves en France sous les traits de Poste Immo, la foncière de la Poste. Selon le directeur de l’immobilier de l’Etat, une foncière de l’Etat permettrait d’accélérer les mesures à prendre pour optimiser le parc et le gérer de façon plus dynamique, plus efficace et plus imaginative. Au-delà de la rénovation énergétique nécessaire des bâtiments – la DIE s’est fixée l’objectif de diminuer de 25% les consommations énergétiques des bâtiments d’ici 2026 – cette dernière travaille aussi sur la sobriété immobilière et l’évolution des usages des bâtiments. Une meilleure optimisation des surfaces permettrait en effet de réduire le nombre de bâtiments et de diminuer les dépenses. Deux opérations pilotes dans le Grand Est et la Normandie sur des actifs du ministère de l’Armée et du ministère de l’économie sont ciblées pour tester la foncière d’Etat. Le DIE ajoute que la création de telles foncières à l’échelle régionale constituerait un outil d’efficacité pour le parc des collectivités locales.
Les marchés globaux, principaux véhicules de la rénovation des bâtiments de l’Etat
Les marchés globaux, et plus précisément le marché global de performance énergétique à paiement différé, sont évidemment envisagés pour rénover massivement le parc. Pour autant, Alain Resplandy-Bernard reconnaît que l’Etat est resté jusqu’à présent à la traîne et a peu recouru à ce véhicule contractuel. Première raison, qui concerne les marchés globaux de performance au sens large : la perte de compétences de pilotage en interne plusieurs années durant. Mais cette tendance devrait s’inverser car l’Etat s’est remusclé et possède maintenant du personnel aguerri dans les services pour monter et piloter des opérations en marchés globaux. D’autant plus que la DIE bénéficie de 5 années de retour d’expériences et de données précises qui ont montré que les MGP vont plus vite et tiennent mieux les budgets et la performance.
Le paiement différé encore regardé avec circonspection
Autre frein qui concerne plus spécifiquement le déploiement des MGPE à paiement différé : les fortes contraintes budgétaires de l’Etat. Les économies d’énergie obtenues grâce à des bâtiments plus performants ne couvrent pas la totalité de la dépense structurelle nécessaire pour rénover un bâtiment. Les universités (nombreuses à ne pas être propriétaires de leur patrimoine bâti) craignent de ce fait de s’y lancer. La direction du budget de l’Etat, de son côté, voit d’un mauvais œil l’emprunt privé qui coûte plus cher que l’emprunt public. Pour autant, ce nouvel outil contractuel devrait être actionné pour rénover notamment les écoles de l’Armée et des gendarmeries. Il est d’ores et déjà prévu de rénover un groupe de deux à trois gendarmeries (l’Etat dispose d’un budget de 55 millions d’euros) dans le cadre d’un seul MGPE à paiement différé. Alain Resplandy-Bernard considère en effet que le paiement différé ne doit être utilisé que sur des opérations conséquentes de l’ordre de 100 M€. Deux marchés de partenariat devraient être aussi lancés en Ile-de-France et en Rhône-Alpes sur de grosses opérations qui concernent des bâtiments de l’Etat.
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